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jubilatedeo
Description du blog :
Catéchèse catholique -Messe du jour (commentaire et homélie) -Les Saints du jour (leurs vies)
Catégorie :
Blog Religion
Date de création :
28.05.2007
Dernière mise à jour :
17.12.2010

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Evangile et homélie du Jeudi saint

Evangile et homélie du Jeudi saint

Publié le 08/04/2009 à 12:00 par jubilatedeo
Evangile et homélie du Jeudi saint
JEUDI SAINT

Le Jeudi saint est un des jours les plus importants de la Semaine sainte : il correspond à la commémoration de la dernière Cène (au Cénacle) suivie de la nuit d'agonie du Christ au Jardin des Oliviers (Gethsémani).
Outre ce mémorial, c'est le Jeudi saint qu'est normalement célébrée la Messe chrismale, pendant laquelle l'évêque bénit et consacre les Saintes Huiles. Dans certains diocèses, cette célébration est un peu anticipée. A Rome, cette célébration a lieu dans la basilique Saint-Jean-de-Latran, cathédrale de Rome et du monde.
Le Jeudi saint est un jour de fête, qui commémore l'institution de l'Eucharistie par Jésus-Christ lors du repas pascal au Cénacle. Pendant la célébration de ce jour, on lit l'évangile du lavement des pieds, et le célébrant refait le geste de Jésus en lavant les pieds de quelques personnes de l'assemblée.
Cette messe est la dernière qui soit célébrée avant la Veillée pascale du Samedi saint. C'est aussi la dernière fois que retentissent les cloches, pendant le gloria, avant la sonnerie de l'alléluia de Pâques. Après le repas pascal, Jésus et ses apôtres se sont retirés à Gethsémani pour y bivouaquer, comme à l'habitude. Cette nuit fut cependant pour le Christ une nuit de prière et d'agonie - au cours de laquelle le Christ accepta le "calice" de sa Passion.
La célébration liturgique du Jeudi saint se termine par une procession, pendant laquelle la réserve eucharistique (les hosties consacrées) est amenée dans un endroit spécialement aménagé, le reposoir. Une veillée y est souvent organisée, et les fidèles peuvent s'y recueillir et adorer le Christ dans une nuit de veille.

Le triduum pascal est un ensemble de trois jours (en latin triduum) qui marquent l'aboutissement de la Semaine Sainte et le sommet de l'année liturgique : c'est la célébration du mystère de Pâques, avec : - la mort et la mise au tombeau de Jésus-Christ (le Vendredi saint), - la descente du Christ aux Enfers durant le "Grand sabbat" du Samedi saint, - la nouvelle de la Résurrection, nouvelle Pâque, durant la nuit du samedi au dimanche (Vigile pascale), où surgit la lumière de Pâques, l'alléluia du Dimanche de Pâques, avec les messes de l'aube et du jour.
Le triduum pascal est l'articulation entre les quarante jours de préparation pénitentielle du Carême et les cinquante jours du temps pascal, jusqu'à la Pentecôte (dont quarante jours jusqu'à l'Ascension).
C'est au pape Pie XII que l'on doit la restauration de la liturgie du triduum pascal dans son ancienne grandeur et à des heures et dans une atmosphère correspondant à celles du mystère, dans la liturgie latine (notamment, la vigile pascale), dans le même esprit qui avait été gardé dans les liturgies orientales.



Prière du matin

Christ, notre Dieu, toi qui, par ta miséricorde, t’es anéanti et as pris l’attitude du serviteur et qui, pendant la Cène avec tes disciples, as mis un linge et lavé les pieds des disciples en nous donnant ainsi l’exemple de l’humilité et de l’amour, viens vers nous, tes indignes serviteurs, et lave nos âmes de toutes leurs impuretés, essuie les plaies de nos péchés et rassemble-nous tous dans ton Église, qui doit être pour le monde le signe de l’amour. Reçois avec ton Père et le Saint-Esprit notre louange, maintenant et toujours, pour les siècles des siècles.


Le jeudi saint : Messe du soir du Jeudi-saint en mémoire de la Cène du Seigneur


Livre de l'Exode 12,1-8.11-14.

Dans le pays d'Egypte, le Seigneur dit à Moïse et à son frère Aaron[1] : « Ce mois-ci sera pour vous le premier des mois, il marquera pour vous le commencement de l'année[2]. Parlez ainsi à toute la communauté d'Israël : le dix de ce mois, que l'on prenne un agneau par famille, un agneau par maison. Si la maisonnée est trop peu nombreuse pour un agneau, elle prendra avec elle son voisin le plus proche, selon le nombre des personnes. Vous choisirez l'agneau d'après ce que chacun peut manger. Ce sera un agneau sans défaut, un mâle, âgé d'un an. Vous prendrez un agneau ou un chevreau. Vous le garderez jusqu'au quatorzième jour du mois. Dans toute l'assemblée de la communauté d'Israël, on l'immolera au coucher du soleil[3].

On prendra du sang que l'on mettra sur les deux montants et sur le linteau des maisons où on le mangera. On mangera sa chair cette nuit-là[4], on la mangera rôtie au feu, avec des pains sans levain et des herbes amères. Vous mangerez ainsi : la ceinture aux reins, les sandales aux pieds, le bâton à la main. Vous mangerez en toute hâte : c'est la Pâque du Seigneur. Cette nuit-là, je traverserai le pays d'Egypte, je frapperai tout premier-né au pays d'Egypte, depuis les hommes jusqu'au bétail. Contre tous les dieux de l'Egypte j'exercerai mes jugements : je suis le Seigneur. Le sang sera pour vous un signe, sur les maisons où vous serez. Je verrai le sang, et je passerai[5] : vous ne serez pas atteints par le fléau dont je frapperai le pays d'Egypte. Ce jour-là sera pour vous un mémorial[6]. Vous en ferez pour le Seigneur une fête de pèlerinage. C'est une loi perpétuelle : d'âge en âge vous la fêterez.[7] »

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris



[1] Dans l'ancienne tradition, Aaron est le porte-parole de Moïse qu’il accompagne dans la guerre ou sur le Sinaï, l'assistant de sa parole et de ses prodiges, le remplaçant en cas d'absence. Il meurt après le départ de Cadès, à Hor la montagne ou à Moséroth. La tradition dit aussi qu’Aaron est fils d'Aram et de Jokabed, frère aîné de Moïse. De sa femme, Elisabeth, il a quatre enfants : Nadab, Abiu, Eléazar et Ithamar. Il est le premier grand prêtre et l'éponyme de la caste sacerdotale (les fils d'Aaron).

[2] Le temps du sacrifice pascal marque le début de l’année, le premier mois. Car le Christ est le principe de tout (Colossiens, I 18) : il n'est pas récent (Psaume LXXXI 10), celui qui naît de Dieu avant tous les siècles ; et c'est lui qui sanctifie toutes choses à travers les temps, depuis le commencement jusqu'à la fin, et particulièrement en cette fête qui marque le premier mois. Il fait « toutes choses nouvelles » (II Corinthiens, V 17) : la nature humaine refleurit dans le Christ : en lui elle redevient ce qu'elle était au commencement (saint Cyrille d’Alexandrie : commentaire du livre de l’Exode, LXIX).

[3] Tout ce que voulait signifier cet agneau devient parfaitement clair quand Jean-Baptiste montre le Christ du doigt : « Voici l'Agneau de Dieu qui enlève les péchés du monde » (Jean, I 36). Jean-Baptiste qui est « la lampe ardente et brillante » (Jean, V 35), éclaire pour nous ce « soir » où la multitude des fils d'lsraël immola, en sacrifice rituel, I'agneau. Tout ce que l'on fit alors dans les ténèbres se montre maintenant sous le vrai jour, la vraie lumière. Tout est resplendissant, tout est plein de la sagesse divine (…) L'Agneau véritable pourvut lui-même à tous les détails de sa propre immolation, et les prescrivit dans l'agneau figuratif. Au premier mois, au dixième jour du mois (où chaque maison, suivant la Loi, « prenait un agneau »), il entra dans la sainte Cité de Jérusalem sous les acclamations de la foule et pendant le temps exact où l'on « gardait » l’agneau, suivant la Loi, lui-même demeura aux alentours de la Cité et du Temple (…) Enfin le quatorzième jour, vers le soir, quand il mangea avec ses disciples l'agneau de l'ancienne Pâque, alors l'Agneau du nouveau sacrifice, qui allait être conduit à l'immolation, qui déjà agonisait dans l’angoisse de sa Passion, s'offrit en sacrifice au Père, de ses propres mains : il prit le pain et le vin, et par un étonnant pouvoir de consécration, le changea dans le sacrement de son corps et de son sang (Rupert de Deutz : « De Trinitate », CLXVII).

[4] Dieu ordonne aussi que la chair soit mangée « pendant cette nuit », c'est-à-dire pendant ce siècle qui est le nôtre, et dont saint Paul écrit : « La nuit a précédé, mais le jour approche » (Romains, XIII 12). Le « jour » dont il parle est le siècle futur, illuminé par le Christ. On mangera donc la chair en ce siècle, ce qui veut dire : pendant que nous sommes dans cette vie, nous communions au Christ par sa sainte chair et son sang précieux, mais quand nous arriverons au jour de sa puissance et de sa gloire, comme dit le psaume, quand nous monterons Jusqu'à la clarté des saints, alors nous serons sanctifiés d'une autre manière, que connaît le dispensateur des biens futurs (saint Cyrille d’Alexandrie : commentaire du livre de l’Exode, LXIX).

[5] L'immolation de l'agneau est le salut d'Israël ; sa mort devient la vie du peuple, et le sang inspire à l'ange de la crainte. Dis-moi, ange, que crains-tu donc ? L'immolation de l'agneau ou la vie du Seigneur, la mort de l'agneau ou la figure du Seigneur, le sang de l'agneau ou l'Esprit du Seigneur ? Evidemment, tu crains parce que tu vois le mystère du Seigneur s'accomplir dans l’agneau, la vie du Seigneur dans l'immolation de l’agneau et la figure du Seigneur dans la mort de l'agneau. Voilà pourquoi tu n'as pas touché Israël mais tu as privé l'Egypte, seule, de ses enfants. Mystère inouï : l’Egypte frappée pour sa perte et Israël protégé pour son salut ! (...) Emmené comme un agneau, immolé, le Christ nous a rachetés de la servitude du monde, comme de la terre d’Egypte ; il nous a libérés de l'esclavage du démon, comme de la maison de Pharaon ; il a marqué nos âmes du sceau de son Esprit et les membres de notre corps de son sang. Il a couvert la mort de honte et mis le diable dans le deuil, comme Moïse le fit pour Pharaon. Il a frappé l'iniquité et privé l'injustice de postérité, comme Moïse le fit envers l’Egypte. C'est lui qui nous a arrachés de l’esclavage pour la liberté, des ténèbres pour la lumière, de la mort pour la vie, de la tyrannie pour une royauté éternelle. Il a fait de nous un sacerdoce nouveau, un peuple à part, pour toujours (Méliton de Sardes : homélie sur la Pâque).

[6] Dans le sens de l'Ecriture Sainte le mémorial n'est pas seulement le souvenir des événements du passé, mais la proclamation des merveilles que Dieu a accomplies pour les hommes (Exode, XIII 3). Dans la célébration liturgique de ces événements, ils deviennent d'une certaine façon présents et actuels. C'est de cette manière qu’Israël comprend sa libération d’Egypte : chaque fois qu'est célébrée la Pâque, les événements de l'Exode sont rendus présents à la mémoire des croyants afin qu'ils y conforment leur vie. Le mémorial reçoit un sens nouveau dans le Nouveau Testament. Quand l'Eglise célèbre l'Eucharistie, elle fait mémoire de la Pâque du Christ, et celle-ci devient présente : le sacrifice que le Christ a offert une fois pour toutes sur la Croix derneure toujours actuel (Hébreux, VII 25-27) : « Toutes les fois que le sacrifice de la Croix par lequel le Christ notre Pâque a été immolé se célèbre sur l'autel, l'œuvre de notre rédemption s'opére » (Vatican II : « Lumen Gentium », 3). Parce qu'elle est mémorial de la Pâque du Christ, l’Eucharistie est aussi un sacrifice. Le caractère sacrificiel de l'Eucharistie est manifesté dans les paroles mêmes de l'institution : « Ceci est mon Corps qui va être donné pour vous » et « Cette coupe est la Nouvelle Alliance en mon Sang, qui va être versé pour vous » (Luc, XXII 19-20). Dans l'Eucharistie le Christ donne ce corps même qu'II a livré pour nous sur la Croix, le sang même qu'II a « répandu pour une multitude en rémission des péchés » (Matthieu, XXVI 28). L'Eucharistie est donc un sacrifice parce qu'elle représente (rend présent) le sacrifice de la Croix, parce qu'elle en est le mémorial et parce qu'elle en applique le fruit (« Catéchisme de l’Eglise catholique », deuxième partie, deuxième section, chapître premier, article 5, 1363-1366).

[7] Il est à la fois nouveau et ancien, le mystère de la Pâque, il est éternel et provisoire, corruptible et incorruptible, mortel et immortel : ancien selon la loi, nouveau selon le Verbe ; provisoire par la figure, éternel par la grâce ; corruptible par l'immolation de l'agneau, incorruptible par la vie du Seigneur ; mortel par l’ensevelissement, immortel par la résurrection. Vraiment ancienne est la Loi, mais nouveau le Verbe : provisoire la figure, mais éternelle la grâce ; corruptible l'agneau, mais incorruptible le Seigneur, lui qui fut immolé comme un agneau, mais qui ressuscita comme Dieu (…) La figure s'en est allée, mais la Vérité reste présente, puisqu'à la place de l'agneau, c'est Dieu qui est venu ; et à la place de la brebis, un homme ; et dans cet homme, le Christ qui contient tout. Ainsi l'immolation de l'agneau, le rite de la Pâque, la lettre de la loi ont abouti au Christ Jésus, en prévision de qui tout s'est produit dans la loi ancienne et, plus encore, dans l'ordre nouveau. Car la Loi est devenue Verbe, et l’ancien est devenu nouveau, et le commandement est devenu grâce, et la figure Vérité, et l'agneau Fils, et la brebis homme, et l'homme Dieu (Méliton de Sardes : homélie sur la Pâque).





Psaume 115 (116), 12-13, 15-18

Bénis soient la coupe et le pain, où ton peuple prend corps.

Comment rendrai-je au Seigneur
tout le bien qu'il m'a fait ?
J'élèverai la coupe du salut,
j'invoquerai le nom du Seigneur.

Il en coûte au Seigneur
de voir mourir les siens !
Ne suis-je pas, Seigneur, ton serviteur,
moi, dont tu brisas les chaînes ?

Je t'offrirai le sacrifice d'action de grâce,
j'invoquerai le nom du Seigneur.
Je tiendrai mes promesses au Seigneur,
oui, devant tout son peuple.

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris



Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 11,23-26.

Frères, moi, Paul, je vous ai transmis ce que j'ai reçu de la tradition qui vient du Seigneur : la nuit même où il était livré[1] , le Seigneur Jésus prit du pain, puis, ayant rendu grâce[2], il le rompit, et dit : « Ceci est mon corps, qui est pour vous. Faites cela en mémoire de moi. » Après le repas, il fit de même avec la coupe, en disant : « Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang. Chaque fois que vous en boirez, faites cela en mémoire de moi.[3] » Ainsi donc, chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez à cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne.

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris


[1] Il institue ce sacrement à la fin du banquet de la Pâque, pour nous montrer qu’il était la fin de la Loi, et qu’il en était aussi l’auteur, que le règne des figures était arrivé à son terme, et que la vérité allait remplacer les figures. Il abolit la solennité maîtresse des Juifs, et il la remplace par un banquet rempli de grandeurs effrayantes (saint Jean Chrysostome : homélie LXXXII sur l’évangile selon saint Matthieu, 1).

[2] Par cette action de grâces, il montrait son Père approuvant le don qu’il faisait de lui-même, et s'associant aux bénédictions qui en découleraient.... Car toute grâce et tout don parfait nous viennent du Père, par le Fils, dans l’Esprit. Cet acte de Jésus est l’exemple de ce que nous devons faire et faisons, en effet, quand nous usons de ce don plein de mystères et source de vie. Nous ne nous approchons de la table sainte qu'après avoir loué et remercié Dieu le Père, avec le Fils et l’Esprit. C'est ainsi que nous allons à la source de la vie et de toutes les bénédictions spirituelles et temporelles : car nous recevons en nous le Verbe, incarné pour nous, qui est vie et source de vie (saint Cyrille d’Alexandrie : commentaire de l’évangile selon saint Matthieu, LXXII).

[3] Mes bien-aimés, aujourd'hui nous rappelons pieusement la veille de la Passion du Seigneur, le jour sacré où il voulut faire un repas avec ses disciples, et, dans sa bonté, accepta d'endurer tout ce qui avait été écrit et annoncé touchant ses souffrances et sa mort, en vue de nous libérer tous. Nous devons donc célébrer dignement de si grands mystères de manière que, par notre participation volontaire à sa Passion, nous méritions d'avoir part à sa résurrection. Car tous les rites sacrés de l'Ancien Testament sont parvenus à leur plein achèvement dans le Christ, lorsqu'il confia à ses disciples le pain qui est son corps et le vin qui est son sang pour qu'ils en fassent l'offrande dans les mystères éternels, et lorsqu'il les donna en nourriture à tous les fidèles pour le pardon de toutes leurs fautes. Cette Passion qu'il a endurée dans son corps, par amour pour nous, afin de nous délivrer de la mort éternelle et de nous préparer le chemin du Royaume céleste, il nous a montré qu'il voulait la souffrir journellement chaque fois que nous célébrerions ce même mystère dans le sacrifice du saint autel, en vue de nous emmener avec lui dans la vie eternelle. Voilà pourquoi il a dit à ses disciples : « Prenez-en tous car ceci est mon corps, et ceci est la coupe de mon sang qui sera répandu pour la multitude en rémission de tous les péchés » (Matthieu, XXVI 26-28). « Ainsi, chaque fois que vous en prendrez, vous le ferez en mémoire de moi » (I Corinthiens, 24.26)… Le Christ est donc présent sur l’autel, le Christ est mis à mort et sacrifié ; le corps et le sang du Christ sont reçus. Lui qui, en ce jour, a donné le pain et la coupe aux disciples, les consacre lui-même aujourd'hui. Non, vraiment, ce n'est pas un homme qui peut consacrer le corps et le sang du Christ posés sur l’autel, mais le Christ en personne, lui qui a été crucifié pour nous. Les paroles sont prononcées par la bouche du prêtre ; le corps et le sang sont consacrés par la puissance et la grâce de Dieu. Aussi garderons-nous purs en toutes choses notre esprit et notre pensée, puisque nous avons un sacrifice pur et saint. Voilà pourquoi nous devons également nous employer à sanctifier nos âmes… Dès lors, nous célébrerons en toute simplicité ces mystères, en faisant attention à ces recommandations, et nous nous approcherons de la table du Christ avec les dispositions qui conviennent, afin de partager éternellement la vie du Christ, lui qui vit et règne avec le Père et le Saint-Esprit, pour les siècles des siècles. Amen (sermon pour le Jeudi-Saint, attribué à saint Augustin, I & III).




Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean 13,1-15.

Avant la fête de la Pâque, sachant que l'heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père[1], Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu'au bout[2]. Au cours du repas, alors que le démon avait déjà inspiré à Judas Iscariote, fils de Simon, l'intention de le livrer, Jésus, sachant que le Père a tout remis entre ses mains[3], qu'il est venu de Dieu et qu'il retourne à Dieu[4], se lève de table, quitte son vêtement, et prend un linge qu'il se noue à la ceinture[5] ; puis, il verse de l'eau dans un bassin, il se met à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu'il avait à la ceinture[6].

Il arrive ainsi devant Simon-Pierre. Et Pierre lui dit : « Toi, Seigneur, tu veux me laver les pieds ! » Jésus lui déclara : « Ce que je veux faire, tu ne le sais pas maintenant ; plus tard, tu comprendras. » Pierre lui dit : « Tu ne me laveras pas les pieds ; non, jamais ! » Jésus lui répondit : « Si je ne te lave pas, tu n'auras point de part avec moi. » Simon-Pierre lui dit : « Alors, Seigneur, pas seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête ! » Jésus lui dit : « Quand on vient de prendre un bain, on n'a pas besoin de se laver : on est pur tout entier. Vous-mêmes, vous êtes purs, ... mais non pas tous. » Il savait bien qui allait le livrer ; et c'est pourquoi il disait : « Vous n'êtes pas tous purs. »

Après leur avoir lavé les pieds, il reprit son vêtement et se remit à table. Il leur dit alors : « Comprenez-vous ce que je viens de faire ? Vous m'appelez ‘ Maître ’ et ‘ Seigneur ’, et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C'est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j'ai fait pour vous. »

Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris


[1] L'heure est venue, non une heure imposée par une puissance inéluctable ; éloignons bien loin de nous la pensée que le Créateur de toutes choses pût subir une nécessité quelconque ; il s'agit d'une heure marquée par lui-même, dans le temps, de concert avec le Père dont il était né avant tous les siècles (saint Augustin : « Tractatus in Johannis evangelium », CIV 2).

[2] Ces paroles sont suivies aussitôt par le récit de l'amère Passion du Christ, en commençant par la dernière Cène, et d'abord par l'humble service du lavement des pieds rendu par Jésus à ses disciples, et par l'envoi du traître au dehors. Viennent ensuite l'enseignement de Jésus, sa prière, son arrestation, son procès, sa flagellation, sa crucifixion et toute la douloureuse tragédie de sa très amère Passion. C'est avant tout cela que saint Jean cite les paroles rappelées à l'instant, pour faire comprendre que tous ces actes, le Christ les a accomplis par pur amour. Cet amour, il l'a bien montré à ses disciples lors de la dernière Cène, lorsqu'il leur affirma qu'en s'aimant les uns les autres, ils suivraient son exemple. Car ceux qu'il aimait, il les aima jusqu'au bout, et il souhaitait qu'ils fassent de même. Il n'était pas inconstant, comme tant de gens qui aiment de façon passagère, abandonnent à la première occasion, et d'amis deviennent ennemis, comme fit le traître Judas. Jésus, lui, a persévéré dans l'amour jusqu'au bout, jusqu'à ce que, précisément par cet amour, il en soit venu à cette extrémité douloureuse. Et pas seulement pour ceux qui étaient déjà ses amis, mais pour ses ennemis, afin d'en faire des amis. Non pour son avantage, mais pour le leur (saint Thomas More : « Traité sur la Passion », I).

[3] « Jésus, sachant que le Père avait tout remis en ses mains. » Et donc aussi le traître. Car si Dieu ne l'avait pas remis en ses mains, Jésus n'aurait pas pu s'en servir comme il le voulait. Le traître était donc déjà livré au pouvoir de Celui qu'il désirait trahir ; il faisait du mal en trahissant, mais ce mal allait devenir, pour Celui qu'il trahissait, un bien qu'il ignorait. Car le Seigneur, qui supportait patiemment ses ennemis, savait ce qu'il devait faire pour ses amis. Son Père lui avait donc tout remis entre les mains, et le mal dont il allait se servir et le bien qu'il devait faire. Sachant qu'il était venu de Dieu et retournait à Dieu. Il ne quitte pas Dieu lorsqu'il vient de lui, il ne nous abandonne pas lorsqu'il retourne à lui (saint Augustin : « Tractatus in Johannis evangelium », LVI 5).

[4] Nous devons, frères très aimés, faire grande attention à la pensée de l'Evangéliste. Avant de parler de la profonde humilité du Seigneur, il a voulu insister d'abord sur sa grandeur. Voilà le but de ces paroles : « Sachant que son Père avait tout remis en ses mains et qu'il était venu de Dieu et retournait à Dieu. » Alors donc que Dieu lui avait tout remis entre ses mains, il lava non pas les mains, mais les pieds de ses disciples. Il savait qu'il venait de Dieu et retournait à Dieu ; et pourtant il a rempli le rôle non pas du Seigneur Dieu, mais d'un serviteur. C'est pour la même raison que l'Evangéliste a voulu mentionner celui qui devait le trahir, qui était venu pour cela (et Jésus le savait). C'était, en effet, le comble de l'humilité que de daigner laver les pieds de celui dont il voyait déjà qu'il allait le livrer à la mort (saint Augustin : « Tractatus in Johannis evangelium », LVI 6).

[5] Cet acte est grand, mais il nous rappelle des choses plus grandes encore. Il s'est dépouillé de ses vêtements et ceint d`un linge, mais auparavant étant dans la gloire de Dieu, il s’était anéanti et avait pris la forme de l'esclave. Il a mis de l’eau dans un bassin pour laver les pieds de ses disciples, mais il allait bientôt répandre son sang pour laver les souillures des pécheurs. Il a essuyé avec le linge dont il était revêtu les pieds qu'il avait lavés ; mais la chair elle-même dont il s'était revêtu, il l’a donnée pour compléter ce que commençait l’action de ses Apôtres (...) Il fut dépouillé de ses vêtements pour être crucifié, et mort il fut enveloppé de linceuls. Toute sa Passion était pour nous une œuvre de purification. Mais avant de souffrir il veut nous donner ses services, pour nous montrer que s'il souffre il souffre pour nous (saint Augustin : « Tractatus in Johannis evangelium », LVI 7).

[6] L’Evangéliste semble vouloir nous initier à l'intelligence de quelque grand mystère en racontant ce lavement des pieds qui de prime abord semble n'être pas à sa place ; car c’était l'usage de laver les pieds avant le repas, au moins aux hôtes que l’on voulait honorer. En essuyant avec le linge dont il est ceint les souillures de leurs pieds, il nous fait entendre qu’il prend sur lui, dans la chair dont il s'est revêtu, toutes les taches de leur âme. (…) Joseph, voulant honorer ses frères, avait fait apporter de l'eau pour qu’on leur lavât les pieds. Celui qui a dit cette parole : « J'ai été au milieu de vous non comme celui qui est à table, mais comme celui qui sert », celui-là verse lui-même l’eau dans le bassin, et lave lui-même les pieds de ses disciples. (Origène : commentaire de l’évangile selon saint Jean, XXXII 2 & 4).


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Pape Benoît XVI
Exhortation apostolique « Sacramentum caritatis » (trad. DC 2377, p. 303 © copyright Libreria Editrice Vaticana)

« Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » (Jn 15,13)

Sacrement de l'amour, la sainte eucharistie est le don que Jésus Christ fait de lui-même, nous révélant l'amour infini de Dieu pour tout homme. Dans cet admirable sacrement se manifeste l'amour « le plus grand », celui qui pousse « à donner sa vie pour ses amis » (Jn 15,13). En effet, Jésus « les aima jusqu'au bout ». Par cette expression, l'évangéliste introduit le geste d'humilité infinie accompli par Jésus : avant de mourir pour nous sur la croix, se nouant un linge à la ceinture, il lave les pieds de ses disciples. De la même manière, dans le sacrement de l'eucharistie, Jésus continue de nous aimer « jusqu'au bout », jusqu'au don de son corps et de son sang. Quel émerveillement a dû saisir le coeur des disciples face aux gestes et aux paroles du Seigneur au cours de la Cène ! Quelle merveille doit susciter aussi dans notre coeur le mystère eucharistique !...

En effet, dans ce sacrement, le Seigneur se fait nourriture pour l'homme assoiffé de vérité et de liberté. Puisque seule la vérité peut nous rendre vraiment libres (Jn 8,36), le Christ se fait pour nous nourriture de Vérité... Tout homme porte en effet en lui le désir inextinguible de la vérité, ultime et définitive. C'est pourquoi le Seigneur Jésus, « le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14,6), s'adresse au coeur désirant de l'homme, qui se sent pèlerin et assoiffé, au coeur qui aspire ardemment à la source de la vie, au coeur quêtant la vérité. En effet, Jésus Christ est la vérité faite personne, qui attire le monde à lui...

Dans le sacrement de l'eucharistie, Jésus nous montre en particulier la vérité de l'amour, qui est l'essence même de Dieu. C'est cette vérité évangélique qui intéresse tout homme et tout l'homme. Par conséquent, l'Église, qui trouve dans l'eucharistie son centre vital, s'engage sans cesse à annoncer à tous, « à temps et à contretemps » (2Tm 4,2), que Dieu est amour. C'est justement parce que le Christ s'est fait pour nous nourriture de la vérité que l'Église s'adresse à l'homme, l'invitant à accueillir librement le don de Dieu.




Homélie Messe

« Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venu pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout. »
Jésus sait que l’heure de sa Passion est là et il veut maintenant en révéler tout le sens aux apôtres réunis autour de lui pour le repas pascal. Jésus va effectuer sa Pâque, il va effectuer son passage vers le Père, il va souffrir sa Passion par amour pour nous afin de nous réconcilier avec le Père. Cet amour il va le vivre « jusqu’au bout » c’est-à-dire jusqu’à la mort et jusqu’à l’extrémité de l’amour. Sa passion et sa mort constitueront ainsi le service d'amour fondamental grâce auquel il libèrera l'humanité du péché

Jésus va déposer son vêtement comme il déposera sa vie entre les mains du Père, avant de le reprendre comme il ressuscitera le troisième jour. Le geste du lavement des pieds nous montre précisément que le chemin pour ressusciter et vivre de la vie divine est le chemin de l’abaissement, de l’humilité où l’homme se fait, à l’imitation du Christ, le serviteur dans la charité de ses frères en humanité. A travers les paroles qu’il lui adresse, c’est précisément cela que Jésus enseigne à saint Pierre ainsi qu’à nous tous. Le don de soi par amour qui se manifeste dans la mort à soi ouvre à la vie véritable. Le repli sur soi qui se manifeste dans la philautie (vivre pour soi dans l’amour de soi) étouffe et conduit à la mort.

Cette page d’évangile du lavement des pieds nous révèle que le christianisme est bien plus qu’une adhésion intellectuelle à un contenu de foi, qu’il est bien plus qu’une philanthropie basée sur la bonne volonté de l’homme. Cela est bien trop humain !
Le christianisme c’est l’expérience d’une foi vivante, animée par la charité qui naît de la rencontre personnelle avec Dieu qui s’est abaissé en son Fils, qui s’est fait homme, qui est venu se mettre à genoux devant moi pour me laver les pieds afin de m’élever et de me donner part à sa vie divine. Et cette expérience n’a rien d’individualiste. Elle ouvre à l’universel car elle fait naître dans la vie de celui qui la goûte le désir de se donner dans l’amour comme le Christ et de coopérer ainsi au salut du monde.

Il n’est pas fortuit que chez saint Jean, l’épisode du lavement des pieds prenne la place du récit de l’institution de l’Eucharistie tel qu’il nous est rapporté par les évangiles synoptiques. Le lavement des pieds nous donne le sens de ce que nous sommes invités à vivre à chaque Eucharistie. A chaque Eucharistie, nous avons de la part de Dieu, le témoignage d'un amour allant "jusqu'à la fin" (Jn 13, 1) et nous pouvons choisir à nouveau de nous engager sur le chemin du don dans l’amour.

La force nous en est donnée par le Christ lui-même qui se donne à nous en nourriture, qui vivifie notre pauvre amour humain par son propre amour divin. Car l’Institution de l’Eucharistie, comme le lavement des pieds, nous enseignent cette chose capitale qu'avant de vouloir se donner, avant de vouloir aimer, il faut « ouvrir son cœur pour accueillir l'amour du Christ ». C'est son amour qui nous rend capables d'aimer nos frères à notre tour : « Si je ne te lave pas les pieds, tu n’auras pas de part avec moi », autrement dit « tu ne pourras pas aimer d’un amour sauveur à l’image du mien ».

Le lavement des pieds et le sacrement de l'Eucharistie sont donc les manifestations d'un même mystère d'amour confié aux disciples et à nous tous « pour que - dit Jésus - vous fassiez, vous aussi, comme moi j'ai fait pour vous » (Jn 13, 15). C’est de cela dont nous sommes appelés à faire mémoire à chaque Eucharistie : « Faites cela en mémoire de moi ».

Faire mémoire. Il ne s’agit pas ici de se souvenir simplement d’un événement passé aussi fondateur soit-il pour notre existence chrétienne. Ce « faire mémoire » est une actualisation du mystère du don du Christ pour nous, nous donnant d’en goûter réellement et efficacement les fruits. Dans le don de l’Eucharistie, Jésus Christ a confié à l'Église l'actualisation permanente du mystère pascal, du mystère de notre salut. Par ce don, il a institué une mystérieuse « contemporanéité » entre le Triduum et le cours des siècles.

Dans l'événement pascal et dans l'Eucharistie qui l'actualise au cours des siècles, il y a un « contenu » que l’espace et le temps ne sauraient limiter puisqu’en lui est présente toute l'histoire en tant que destinataire de la grâce de la rédemption. A chaque Eucharistie, Dieu nous lave tout entier en nous incorporant à lui par la communion eucharistique. Il nous invite à accueillir son amour sauveur et à nous laisser transformer par lui afin d’en être les canaux auprès de nos frères. Oui, c’est bien dans la mesure où nous nous unirons au Cœur eucharistique du Christ, que nous lui permettrons d’opérer en nous ce débordement que nous appelons charité fraternelle.

« Seigneur, nous te rendons grâce pour le don de l’Eucharistie, signe éternel et efficace de ton amour divin pour nous. Ce don de ton amour nous soutient sur le chemin de la pleine communion avec le Père à travers toi et dans l’Esprit. Ce don de ton amour nous éduque à l’amour et nous permet de goûter déjà les prémices de la joie de ton Royaume.
En prenant le temps ce soir de t’adorer dans le Très Saint Sacrement et de méditer le mystère de la Dernière Cène, c’est l’âme remplie de gratitude que nous nous plongerons dans l'océan d'amour qui jaillit de ton cœur et que nous ferons nôtre l'hymne d’action de grâce du peuple des rachetés : « Tantum ergo Sacramentum / veneremur cernui… »
Frère Elie
http://www.homelies.fr/homelie,jeudi.saint,2381.html



Homélie

Jésus nous le redit : C’est un exemple que je vous ai donné (Jean 13.15), et : Faites cela en mémoire de moi. Nous devons nous laver les pieds les uns aux autres. Jésus nous a aussi commandé de célébrer l’Eucharistie. Ces deux actions — se laver les pieds les uns aux autres et célébrer l’Eucharistie — sont très expressives, ce sont des « paroles » en actes. Et ces « paroles », c’est le testament de Jésus, les instructions qu’il nous laisse. Dans ces deux gestes, dans ces deux actions, Jésus a en quelque sorte résumé une fois encore tout ce qu’il veut nous dire, ce qui est important pour lui, ce qu’il voudrait nous confier, comme un dépôt sacré. Dans ces deux gestes, il s’est mis tout entier et il veut qu’aujourd’hui, nous prenions le risque de nous laisser toucher au cœur par eux ; c’est en effet par ces gestes que Jésus peut nous rencontrer, aussi veut-il que nous les renouvelions, et pas seulement de façon extérieure. Ce soir, bien sûr, de façon extérieure, ce sera un rite ; mais il faut qu’en nous, ces gestes deviennent chair et sang, qu’ils transforment notre vie, au point de rendre vrai ce que Jésus dit un peu plus loin dans l’évangile d’aujourd’hui : Heureux êtes-vous si vous le faites. Jésus veut que nous ayons à cœur de les renouveler afin qu’ainsi nous puissions être heureux, trouver la joie qu’il veut nous donner, précisément en cette nuit qui précède sa Passion.
Cela se passe pendant un repas, mais ce repas de fête, pour une fois, n’est pas un repas joyeux, car les apôtres savent — Jésus le leur a dit — qu’il leur fait ses adieux, qu’un destin tragique l’attend. En cette heure, donc, pèsent la tristesse et la crainte de ce qui va arriver. En cette heure où règne non la joie mais l’accablement, soudain Jésus se lève et il dépose ses vêtements (Jean 13.4), ses vêtements de fête. Il se trouve alors en simple tunique, son vêtement de dessous, devant ses apôtres ; il prend un linge et de l’eau, et il commence à leur laver les pieds.
Il dépose ses vêtements. Dans son évangile, saint Jean nous laisse pressentir que le fait que Jésus ôte ses vêtements est, dans un sens, une préfiguration de ce qui se passera le lendemain, lorsqu’on lui volera ses vêtements et que lui se retrouvera nu devant la foule des badauds moqueurs, avant d’être crucifié. Il dépose ses vêtements. Le vêtement est une protection, c’est aussi un signe de dignité. Nous savons à quel point les gens souffrent de ne pouvoir se couvrir correctement lorsqu’ils sont pauvres, miséreux, sans abri. Lorsque l’on ne peut plus s’habiller décemment, c’est une sorte d’aliénation, une perte de dignité. Nous sommes un certain nombre ici à savoir ce que l’on ressent lorsque l’on se trouve tout à coup à l’hôpital, dans la chemise de nuit réglementaire, un malade quelconque parmi d’autres malades, privé de ses vêtements.
Mais, en même temps, ce que va vivre Jésus au jour de sa Crucifixion, c’est aussi l’expérience que, dans cette dépossession, nous devenons tous égaux. Alors, les différences de statut et de rang social disparaissent — des différences qu’exprime aussi notre façon de nous habiller. Alors, nous ne sommes plus que des êtres humains, éprouvés par la misère et la souffrance, avec un cœur dans lequel il y a peut-être de la peur mais aussi de l’espérance. Alors, nous sommes tous égaux et plus rien ne compte de ce que nous étions auparavant aux yeux de la société : seul compte encore ce que nous sommes réellement devant Dieu et les uns vis-à-vis des autres ; alors, nous valons ce que vaut notre cœur.
« Au soir de notre vie, dit saint Jean de la Croix, nous serons jugés sur l’amour. » Non pas sur la position que nous occupions dans la société, non pas sur la splendeur de nos vêtements, mais sur l’amour que nous avons au cœur. Jésus dépose ses vêtements, et il commence à montrer à ses disciples ce qu’est sa voie : c’est le chemin qui s’achève à la Croix. Il se dépouille lui-même, il se fait pauvre devant eux et, à leur grande surprise, il se penche, il s’agenouille devant eux et leur lave les pieds.
Que signifie ce geste par lequel il se dépossède lui-même, par lequel il s’humilie devant eux ? Il veut atteindre leur cœur, il veut toucher leur cœur et le nôtre. Un peu plus tard, il leur dira : Je ne vous appelle plus serviteurs... je vous appelle amis (Jean 15.15). Mais cela ne sera possible qu’après qu’il leur aura lavé les pieds. « Il faut que l’amour s’abaisse », a dit la petite sainte Thérèse. Quant à Pierre, il est désarmé, et l’on ne peut que l’aimer pour sa réaction spontanée, pour le mouvement de son cœur, qui exprime si directement ce qu’il ressent, car il ne comprend pas. Comment peux-tu, toi qui es le Seigneur et le Maître, te comporter avec nous en esclave ? Comment peux-tu, toi le Maître admiré et révéré, toi qui es le Messie, comment peux-tu nous laver les pieds ? Jamais !
Rappelons-nous : à Césarée de Philippe, il avait déjà dit : Jamais ! (Matthieu 16.22). Il venait de confesser : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant (Matthieu l6.16) ; puis Jésus avait annoncé qu’il devait souffrir. La réaction de Pierre avait été un « jamais » catégorique : Cela ne l’arrivera jamais. C’est alors que Jésus l’a rabroué, plus sévèrement qu’il n’a jamais traité un autre disciple : Passe derrière moi, Satan ! (Matthieu 16.23), tes pensées sont comme celles des hommes, non comme celles de Dieu. Toi, me laver les pieds ? Jamais !(Jean 13.6). Il est heureux que l’évangile nous ait conservé cette spontanéité de Pierre : ainsi, nous pouvons nous retrouver en lui et découvrir à quel point nous-mêmes nous n’acceptons pas que Jésus s’abaisse devant nous. Pouvons-nous comprendre cela ? Pouvons-nous comprendre que Dieu nous lave les pieds ? Tu comprendras plus tard (Jean 13.7), dit Jésus à Simon Pierre. Oh oui ! il comprendra plus tard, mais seulement après une arrière expérience : lorsqu’il aura lui-même trahi son Maître vénéré, en jurant : Je ne connais pas cet homme (Matthieu 26.72). Jésus l’a regardé, et il est sorti en pleurant ; alors il a compris. Tu comprendras plus tard. Pourquoi Dieu s’est-il fait si petit ?
Si je ne te lave pas les pieds, tu n’as pas de part avec moi (Jean 13.8). Jésus, si tu ne me laves pas les pieds, je n’ai plus de part avec toi. Si je n’accepte pas que tu t’abaisses devant moi, que tu me montres ton amour au point que tu te fasses petit devant moi, alors je ne peux pas être ton ami. L’amitié implique nécessairement la réciprocité, et Dieu veut être pour nous un ami : c’est pourquoi il se fait petit devant nous. Il veut qu’entre lui et nous s’établisse la communion, l’amitié. C’est un exemple que je vous ai donné, dit Jésus. Rien ne peut autant toucher le cœur de l’homme que de venir à lui comme Jésus vient à nous dans le lavement des pieds.
Un jour, le Patriarche Athénagoras de Constantinople envoya un émissaire à Paul VI, à Rome, pour lui transmettre un message dans lequel il exprimait de façon toute particulière son rapprochement avec Pierre, avec le Pape ; c’était donc un geste de bonne volonté et de rapprochement entre chrétiens séparés. À la complète surprise de son entourage, Paul VI s’est soudain agenouillé devant l’émissaire du Patriarche et lui a embrassé les pieds — le Pape, s’agenouiller devant un hôte et lui embrasser les pieds ! Les témoins de la scène en furent tellement abasourdis que, le lendemain, le journal officiel du Vatican n’a pas osé la relater : ils ne savaient pas comment raconter cet événement. Mais ce geste du Pape a beaucoup plus fait pour le rapprochement entre chrétiens que bien des discours et documents.
Vous vous laverez les pieds les uns aux autres (Jean 13.14), cela veut dire : soyez les serviteurs les uns des autres. Chacun doit accorder à l’autre plus d’estime qu’il n’en a pour lui-même, dit saint Paul. Rien ne peut autant toucher le cœur de l’homme qu’une telle humilité, qu’une telle humiliation de soi-même. Jésus veut que les disciples adoptent cette attitude les uns vis à-vis des autres. Bien sûr, les discussions, le dialogue, tout cela est important ; mais il est plus important encore que nous nous lavions les pieds les uns aux autres.
Ce qu’a fait Jésus en lavant les pieds de ses disciples, il le fait encore au cours de la Cène. Il prend du pain et du vin, les donne à ses disciples, et dit : « Ceci est mon Corps, ceci est mon Sang, livrés pour vous ». Chacun de ces gestes est un geste corporel, physique : il donne son Corps et son Sang sous la forme de pain et de vin. Il ne donne pas n’importe quoi : c’est lui-même qu’il donne. Bien entendu, ce geste a lui aussi provoqué protestations et contestations, on ne l’a pas compris. Rappelons-nous : dans la synagogue de Capharnaüm, les gens furent outrés d’entendre Jésus affirmer : Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi (Jean 6.56). À ce moment-là, beaucoup de ses disciples ont dit : c’est insupportable — et ils sont partis, pour ne plus revenir ; Jésus a alors demandé aux Apôtres : Voulez-vous partir, vous aussi ? (Jean 6.67). Et Pierre de répondre : À qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle (Jean 6.67-68).
Aussi dures à entendre que nous paraissent ces paroles, il nous faut croire que ce petit morceau de pain et ces quelques gorgées de vin dans le calice sont le Corps et le Sang du Christ, donnés pour nous. Mais, probablement, nous ne comprendrons ce mystère, notre cœur n’en percevra le sens que lorsque nous serons prêts à nous laver les pieds les uns aux autres. Aussi longtemps que nous ne nous dépouillerons pas, les uns vis-à vis des autres, de nos beaux habits tissés d’orgueil, de vanité et de présomption, nous ne pourrons pas accepter que Dieu se fasse si petit et se donne à nous en si peu de chose.
Prions le Seigneur pour que ces deux actes se gravent profondément dans nos cœurs et que nous éprouvions la joie qu’il nous a promise : Heureux êtes-vous si vous le faites. C’est un exemple que je vous ai donné, et : Faites cela en mémoire de moi.



Méditation

Puisse l’heure présente faire revivre pour nous un grand souvenir. Nous avons présent à l’esprit tout ce qui a été dit et accompli au cours de cette dernière Cène (Luc 22.15) que le divin Maître lui-même a tant désirée à la veille de sa Passion et de sa mort. Et lui-même aussi, il a voulu que cette réunion soit si pleinement chargée de sens, si riche de souvenirs, si émouvante dans les mots et dans les sentiments, tellement féconde en actes et préceptes nouveaux que nous ne finirons jamais de les méditer et de les approfondir. C’est une Cène testamentaire, une Cène infiniment affectueuse (Jean 13.1), et infiniment triste (Jean 16.6), et tout ensemble mystérieusement révélatrice de promesses divines, de visions suprêmes.
La mort menace ; il y a des présages inouïs de trahison, d’abandon, d’immolation ; tout d’un coup, la conversation s’arrête, tandis que la parole de Jésus jaillit, continue, neuve, extrêmement douce, tendue vers la suprême confidence, comme balançant entre la vie et la mort. Le caractère pascal de cette Cène s’intensifie et se développe ; l’ancienne alliance, alliance séculaire qui s’y reflétait, se transforme et devient la nouvelle alliance ; la valeur sacrificielle, libératrice et salvifique de l’Agneau immolé, qui donne aliment et symbole au repas rituel, s’explique et se concentre dans une nouvelle victime, dans un nouveau repas ; Jésus déclare qu’ici, à table, il est lui-même, avec son Corps et son Sang, l’objet et le sujet du sacrifice, prévu, signifié, offert pour être, en continuité d’intention et d’action, accompli, consumé ; rendu nourriture pour tous ceux qui auraient aptitude à la vie éternelle et faim d’elle.
Et voilà que jaillit de cette Cène d’adieu, de souffrance et d’amour, le sacrifice eucharistique. Nous le savons et en demeurons éblouis ; et voici une dernière surprise, celle qui pour nous, ce soir, forme le point focal de notre inclination et de notre piété. Qui aurait jamais pu supposer une parole semblable, parole qui résume et perpétue : le Maître, promis à la mort, déclare qu’il est, lui, le véritable, l’unique agneau pascal, et il ajoute : Faites ceci en mémoire de moi (1Corinthiens 11.24).
À l’offrande eucharistique, participe activement tout le peuple de Dieu, croyant et fidèle, revêtu comme il est d’un « sacerdoce royal », ainsi que l’écrivait saint Pierre (1Pierre 5.9). En tant que tel, il est particulièrement invité, en ce Jeudi saint, à se réjouir, à rendre grâce pour l’institution de l’Eucharistie, et à en exalter les infinis trésors divins d’amour et de sagesse.

Paul VI


Prière du soir

Ô Christ, toi qui par amour pour nous et pour demeurer avec nous, es devenu le Pain de la vie et la Coupe du salut, donne nous de nous aimer les uns les autres comme tu nous as aimés. Que l’Esprit Saint qui est avec toi dans l’Eucharistie, dans ta Passion et dans ta mort, allume en nous un amour plus fort que la mort et qu’il nous apprenne à partager avec tout homme le pain et l’amour, afin que le monde, en voyant nos actes, se mette à croire en toi qui es l’Amour vrai et éternel. Permets-nous d’être les rejetons greffés sur toi par l’amour. Que notre sommeil te glorifie, car éternel est ton amour, grâce auquel nous existons et grâce auquel nous savons que chaque croix nous mène à la Résurrection. Fais-nous ressusciter en ton amour dans notre vie ici-bas et dans l’éternité, car tu es le Seigneur de la vie et de la mort, et c’est à toi que nous confions notre vie pour les siècles.